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COS Chronicle

« Le style Cos, un équilibre entre finesse, élégance et puissance »

INTERVIEW -

Tristan Pommier est un homme occupé. Directeur de la sommellerie du St-Regis de Hong Kong, il jongle entre clientèle internationale et clientèle chinoise, entre trois restaurants et un bar, entre les deux restaurants étoilés de l’hôtel : la cuisine française proposée par Olivier Elzer à l’Envol, dont il est aussi le directeur, et la cuisine cantonaise du chef Hung Chi-Kwong à la tête de Rùn. Entre un rendez-vous et une dégustation, il prend quelques minutes pour nous parler de son métier, de la Chine et bien sûr de Cos d’Estournel.

Comment le vin est-il entré dans votre vie ?

Ma famille avait une activité de grossiste en fruits et légumes en Bretagne. Ils travaillaient beaucoup avec la restauration, et j’ai eu la chance très jeune de parcourir les belles tables de la région. C’est lors de mon bac professionnel hôtelier que tout a commencé. J’ai rencontré le vin et sa magie. Je suis très curieux de nature et le vin a le pouvoir de sans cesse nourrir la curiosité. Une vie ne suffit pas pour tout découvrir. Il y a toujours de nouveaux vignerons, de nouveaux millésimes, des régions qui émergent. C’est un monde en constante évolution.

Et jeune passionné, quels vins rêviez-vous de déguster ?

Quand on commence, on a nécessairement les grands noms en têtes, à Bordeaux, en Bourgogne, les vins mythiques. Et j’ai eu la chance de commencer à les goûter quand j’ai commencé à travailler comme commis sommelier au restaurant d’Alain Ducasse, au Dorchester à Londres. Toutes les semaines, on ouvrait un très grand vin, en offrant des choses incroyables au verre. Mais assez vite, j’ai été à la recherche des nouveaux vignerons : les découvrir et voir comment ils évoluent. C’est ce qui continue de me passionner, même si ouvrir de très grands vins reste une émotion exceptionnelle.

Que vous évoque Cos d’Estournel ?

Ma première rencontre avec Cos d’Estournel était à Londres. On proposait Cos d’Estournel 1990 au verre. Au sein de Saint-Estèphe, qui a une image de puissance, j’ai toujours aimé Cos d’Estournel pour sa capacité à proposer cette densité et cette profondeur, mais avec une touche très fine et avec une sensation de terroir qui est magnifique. Ce sont des vins qui allient équilibre, pureté et fraicheur.
C’est le style Cos, un équilibre entre la finesse des tanins, l’élégance aromatique et la puissance du terroir. C’est un vin qui parle beaucoup à nos clients, par sa qualité mais aussi par la puissance de l’imaginaire qu’il véhicule. Il y a la dégustation et il y a l’histoire, et l’histoire de Cos d’Estournel, cette invitation au voyage, donne une magie supplémentaire au vin. Pour moi qui vis à l’étranger, j’y suis particulièrement réceptif.

Quel est votre meilleur souvenir de dégustation de Cos d’Estournel ?

Cos d’Estournel 1962, que l’on propose à la carte de l’Envol comme de Rùn, et que l’on a ouvert récemment. Avoir encore tellement de fraîcheur et d’intensité pour un millésime aussi âgé, c’est vraiment impressionnant. Et le vin a encore un potentiel de vieillissement ! Nous l’avons partagé avec un client passionné. C’était un grand moment.

L’exotisme est au cœur de l’univers de Cos d’Estournel, mais vu de Chine, n’est-ce pas le Médoc qui est exotique ?

Bien sûr, ça fait rêver. Ils ont cet imaginaire de grands vins, de grands châteaux, un imaginaire où le luxe et l’histoire de France se rejoignent. Cela dit, la clientèle chinoise amatrice de vin est très curieuse et a souvent voyagé. Ils connaissent le Médoc, ils ont souvent été à Cos d’Estournel.

« L’histoire de Cos d’Estournel, cette invitation au voyage, donne une magie supplémentaire au vin. »

Il y a deux restaurants étoilés au St-Regis : L’Envol qui propose une cuisine française et Rùn qui offre une cuisine cantonaise. Vous devez composer deux cartes des vins différentes ?

Chaque carte des vins a sa propre identité. A L’Envol, 75% de vins sont français. Sur Rùn, nous avons 40% de vins étrangers et du nouveau monde, y compris des vins chinois. Mais nous avons les grands classiques et une belle carte de vins français. Pour les clients chinois, que ce soit pour se faire plaisir, célébrer ou accompagner un repas d’affaire, avoir une belle bouteille d’un vin français, c’est toujours un plus. Par exemple, nous proposons la même page de Cos d’Estournel dans les deux cartes.

Et pour Cos, y a-t-il des accords que vous recommandez particulièrement à vos clients ?

Nous avons quatre millésimes de Cos d’Estournel à la carte, et Pagodes de Cos 2010 en magnum. On cherchait des millésimes de connaisseurs, ceux dans lesquels Cos d’Estournel avait particulièrement réussi, et qui sortaient des sentiers battus des grands millésimes bordelais que tout le monde connait. Chaque millésime a son identité.

Par exemple, Pagodes 2010 qui est plus jeune, avec plus de fraîcheur et des tanins un peu plus fermes, fonctionne très bien sur le wok de pigeon aux asperges et aux champignons qui est à la carte de Rùn.

Cos d’Estournel 2003, année de la canicule, accompagne merveilleusement l’intensité d’un agneau frit avec une sauce aux noix de cajou que le Chef Hung Chi-Kwong propose à la carte du Rùn aussi.

A L’Envol, le chef Olivier Elzer propose lui un agneau de Lozère confit qui joue la carte de la finesse et offre un accord parfait avec Cos d’Estournel 1986, qui se boit avec beaucoup d’élégance en ce moment, avec une expression de terroir exceptionnelle.

Cos d’Estournel 1971, qui a énormément de finesse aussi, une texture magnifique, un fruit très pur, se marie parfaitement avec le gras et la douceur du canard laqué proposé à la carte de Rùn.

Et pour finir, Cos d’Estournel 1962 que j’évoquais un peu plus tôt : pour l’occasion, le chef Olivier Elzer avait conçu tout un repas autour du caviar, dont un bœuf au caviar. Le côté un peu terreux du caviar, qui ressort quand on l’associe à la viande, a parfaitement fonctionné avec Cos d’Estournel 1962, sa fraîcheur toujours bien présente, mais aussi ce profil évolué caractérisé par des notes de truffe. C’était une très belle surprise.

La Chine entretient depuis des années une histoire d’amour avec les grands vins de Bordeaux. Comment expliquez-vous cette passion chinoise ?

Il y a des raisons pragmatiques : les grands châteaux bordelais ont été plus disponibles plus rapidement sur le marché chinois. Les bordelais ont été plus volontaires que les vignerons bourguignons. Ils ont fait la démarche d’aller vers les consommateurs et vers le marché chinois. Par ailleurs, le style bordelais s’accorde très bien au palais chinois. Et puis, il y a l’imaginaire que l’on évoquait : les châteaux, les grands vins, les grands crus, le classement… La magie de Bordeaux est plus accessible à l’imaginaire chinois. Mais les choses évoluent : les grands domaines bourguignons sont de plus en plus présents.

Y a-t-il un « goût chinois » du vin ? Pour être sommelier en Chine, faut-il réinventer sa grammaire d’accords mets et vins ?

On a parfois une image caricaturale du consommateur chinois. Dans la restauration, notre clientèle connait aussi bien le vin que les clients que l’on pourrait avoir à Paris ou à Londres. Ils ont bien sûr leur propre palais qui les amène souvent vers des vins plus puissants, avec de l’extraction, un peu marqués par l’élevage. Mais c’est vrai aussi des consommateurs américains ou australiens. Je pense que l’erreur serait justement de vouloir réinventer sa grammaire mets et vins.
Lorsque l’on travaille avec le Chef, on essaye de se projeter sur ce qui va leur plaire bien sûr, mais en leur offrant notre vision de sommelier et Chef français. Lorsqu’ils viennent à L’Envol, c’est ce qu’ils viennent chercher. Ils sont en attente de découvertes, et on essaye toujours de nourrir cette curiosité : on explique pourquoi on propose tel accord, on explique l’histoire, on explique comment déguster. Ils sont très à l’écoute et très ouverts à la découverte.

Le mot de la fin ?

J’ai toujours beaucoup aimé Cos d’Estournel, et c’est pour cela que j’ai souhaité le mettre en avant sur nos cartes. Et il y a quelque chose d’important : ce sont des vins qui restent accessibles sur une carte de restaurant. Ce ne sont pas des vins de musée.


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